La loi relative à l’accélération des énergies renouvelables a été publiée au Journal Officiel du 10 mars 2023. Cette loi comporte plusieurs dispositions concernant la pratique de l’agrivoltaïsme.
L’agrivoltaïsme représente un enjeu majeur pour la transition énergétique : France Agrivoltaïsme évalue le potentiel des projets agrivoltaïques en 2050 entre 60 et 80 GW, répartis sur 20 000 à 30 000 exploitations, soit l’équivalent de 80 000 à 120 000 hectares (https://www.senat.fr/rap/l22-013/l22-0131.pdf)
Pour autant, le développement de l’agrivoltaïsme suscite de fortes inquiétudes exprimés par les agriculteurs, tenant notamment à un risque de conflits d’usage quant aux terres agricoles.
Un encadrement juridique était donc nécessaire.
Le projet de loi porté par le Gouvernement ne comportait aucune mesure relative à l’agrivoltaïsme et il a fallu compter sur des amendements parlementaires pour que le texte aborde cette pratique. En particulier, les modifications apportées concernant l’agrivoltaïsme s’inspirent en grande partie d’une loi en faveur du développement de l’agrivoltaïsme adoptée par le Sénat le 21 octobre dernier.
Il convient de se référer à l’article 54 de la loi du 10 mars 2023, qui a pour effet d’instituer une section 7 au sein du Chapitre IV du Titre Ier du Livre III du code de l’énergie, intitulée « Dispositions spécifiques à la production d’électricité à partir d’installations agrivoltaïques ».
Tout d’abord, la loi inscrit le développement de l’agrivoltaïsme parmi les objectifs de la politique énergétique nationale, listés à l’article L. 100-4 du code de l’énergie, « en conciliant cette production avec l’activité agricole, en gardant la priorité donnée à la production alimentaire et en s’assurant de l’absence d’effets négatifs sur le foncier et les prix agricoles ».
Ensuite, la loi consacre la définition de l’agrivoltaïsme en créant un article L. 314-36 au sein du code de l’énergie. Selon la définition donnée,
Une installation de production d’énergie photovoltaïque ne peut donc être qualifiée d’agrivoltaïque que si elle réunit les conditions suivantes :
- Elle est implantée sur une parcelle agricole.
- Elle contribue durablement à l’installation, au maintien ou au développement d’une production agricole en apportant directement à la parcelle agricole l’un des services suivants : amélioration du potentiel et de l’impact agronomiques, adaptation au changement climatique, protection contre les aléas et amélioration du bien-être animal.
- Elle doit garantir une production agricole significative et un revenu durable à un agriculteur actif ou à une exploitation agricole à vocation pédagogique.
- Elle doit être réversible et permettre à la production agricole d’être l’activité principale de la parcelle agricole.
Un décret en Conseil d’Etat est annoncé aux fins de préciser les services auxquels se réfère l’article L. 316-34 du code de l’énergie ainsi qu’une méthodologie définissant la production agricole significative et le revenu durable en étant issu.
Ensuite, la loi du 10 mars 2023 apporte des précisions quant à la procédure administrative d’implantation d’une installation agrivoltaïque.
Il est ainsi prévu à l’article L. 314-16 du code de l’énergie que lorsque l’autorité administrative est saisie d’une demande d’autorisation d’une installation agrivoltaïque, elle en informe sans délai le maire de la commune et le président de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) concernés, selon des modalités devant être définies par décret en Conseil d’Etat. Le texte n’impose pas que le projet fasse l’objet d’un avis de la part de ces autorités.
Par ailleurs, la loi d’accélération des énergies renouvelables procède également à une modification du code de l’urbanisme dans le but de simplifier l’implantation de parcs agrivoltaïques.
En ce sens, l’article L. 111-27 du code de l’urbanisme est modifié afin de qualifier les installations agrivoltaïques comme étant « nécessaires à l’activité agricole ». Cet article permet ainsi leur construction en dehors des « parties urbanisées » des communes soumises au Règlement National de l’Urbanisme (RNU) ainsi que dans les zones agricoles définies par les plans locaux d’urbanisme et cartes communales.
La loi crée également l’article L. 111-28 du code de l’urbanisme destiné à éviter les développements de projets dits « alibis ». Il précise que l’installation des serres, hangars et ombrières à usage agricole supportant des panneaux photovoltaïques doit correspondre « à une nécessité liée à l’exercice effectif d’une activité agricole, pastorale ou forestière significative », et ce dans le but de garantir la primauté de l’activité agricole.
Il convient par ailleurs de noter que les parcelles agricoles accueillant des activités agrivoltaïques demeureront éligibles aux aides de la politique agricole commune (PAC), ce qui est logique compte-tenu du fait que l’activité agricole doit y rester prédominante (cf. art. L. 314-38 du code de l’énergie).
Enfin, plusieurs mesures ont été prévues afin d’encadrer le démantèlement des installations et la remise en état du site. Outre le fait que le parc agrivoltaïque doit nécessairement être « réversible », la loi permet à l’autorité administrative de soumettre l’autorisation de ces installations à la constitution de garanties financières destinées à assurer le démantèlement et la remise en état du site (cf. art. L. 314-40 du code de l’énergie). Par ailleurs, les formalités de démantèlement d’un point de vue urbanistique sont simplifiées : le permis de construire ou la décision de non-opposition à déclaration préalable doit imposer, au titre de ses prescriptions, l’enlèvement des ouvrages et la remise en terrain du site (cf. art. L. 462-6-2 c.urb.), tandis que les travaux de démantèlement et de remise en état sont dispensés de formalité au titre du code de l’urbanisme (cf. art. L. 421-5-2 c.urb.)
Il conviendra de suivre avec attention la publication des décrets d’application de ces dispositions législatives, dont certaines notions demeurent encore très imprécises.