ANNULATION DE L’ARRÊTÉ D’ORGANISATION DE LA CNCFS FAUTE DE PRISE EN CONSIDÉRATION SUFFISANTE DES ASSOCIATIONS

La loi n°2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes a intégré au droit positif plusieurs mesures phares relatives à la protection animale. Outre l’interdiction de vendre des chiens et chats en animalerie ou celle, à venir, de présenter des animaux sauvages dans les cirques, une mesure moins popularisée mais pour autant majeure en termes de détention d’espèces non domestiques a été adoptée.

En effet, l’arrêté ministériel du 8 octobre 2018 fixant les règles générales de détention d’animaux d’espèces non domestiques impose, selon l’espèce et selon l’effectif, la détention d’un certificat de capacité par la personne en charge d’entretenir les animaux. L’obtention de ce certificat atteste en principe des connaissances et de l’aptitude de son titulaire lui permettant d’aménager un espace compatible avec la présence des animaux détenus et d’assurer leur santé et bien-être.

Les articles R.413-3 et suivants du code de l’environnement définissent les conditions d’obtention d’un tel titre, dont, fort logiquement, celle consistant à fournir tout document justifiant des compétences animalières du candidat. Le préfet de département délivre par la suite le certificat, pour une durée limitée ou non.

En raison du rôle central de ce certificat dans le contrôle de la détention d’animaux non domestiques, la loi du 30 novembre 2021 précitée a renforcé et, surtout, diversifié la composition de l’organe participant à l’identification des diplômes et conditions d’expérience requis.

La loi du 30 novembre 2021 a en effet renforcé l’assise juridique de cette commission par une définition légale de sa composition et de son rôle. L’article L.413-9 du code de l’environnement entérine sa place « auprès du ministre chargé de la protection de la nature » et impose une composition comprenant notamment des « représentants des associations de protection des animaux » ainsi que « en fonction de l’ordre du jour », des représentant des animaux des établissements détenant des animaux sauvages.

Par un arrêté du 9 mars 2023 fixant les conditions d’organisation et de fonctionnement de la Commission nationale consultative pour la faune sauvage captive, le ministre de la transition écologique a repris la subdivision préexistante au sein de la CNCFS. Ses articles 3 et 4 prévoient deux formations distinctes au sein de la commission, selon la compétence mise en œuvre. Une première formation a pour objet de conseiller le ministère quant à l’amélioration des conditions d’entretien des animaux détenus. Une seconde formation émet les avis requis dans le cadre, notamment, de la délivrance de certificats de capacités.

La composition de ces formations prévue par ce texte a toutefois provoqué la critique immédiate des associations de protection animale, du fait de son déséquilibre manifeste.

L’arrêté du 9 mars 2023 compose en effet la formation « Conseil au ministère » par, entre autres, 3 membres d’associations face à 18 représentants des intérêts des établissements détenant des espèces de faune sauvage. Quand bien-même ces derniers seraient convoqués selon l’ordre du jour, le texte autorise la présence d’un maximum de 10 d’entre eux. Pire, la formation « certificat de capacité » était quant à elle également composée de 18 représentants des établissements zoologiques, sans qu’aucun porte-parole des associations de protection animale ne soit prévu. Face à une telle mainmise de la CNCFS par les établissements zoologiques, l’association Code Animal a formé un recours en annulation des dispositions définissant sa composition devant le Conseil d’Etat.

Par un arrêt n°488380 du 31 décembre 2024, les juges du Palais royal ont prononcé l’annulation non rétroactive des dispositions de l’arrêté du 9 mars 2023 organisant la formation « certificat de capacité » de la CNCFS.

Cette décision appelle plusieurs observations.

D’une part, il est regrettable que le Conseil d’Etat n’ait pas reconnu le déséquilibre dont souffre la formation « conseil au ministère » de la commission, pourtant provoqué par un rapport de 1/6 entre les associations et les établissements détenant des animaux non domestiques. Le juge administratif a considéré que faute de « règle relative à l’équilibre ou à la proportion » des composantes de la CNCFS, il ne pouvait être considéré que cette composition était contraire à la loi. Il en ressort une lecture stricte de l’article L.413-9 du code de l’environnement imposant la (seule) présence de représentants d’association, sans apprécier l’effectivité de leur participation. Ainsi le rôle des associations au sein de cette formation demeurera-t-il symbolique puisque systématiquement submergé par le nombre des représentants du monde zoologique. Plusieurs éléments d’appréciation concrète auraient pourtant pu révéler une erreur manifeste d’appréciation : le fait que la composition prévue assure une majorité acquise des votes en faveur des établissements détenant des animaux ou encore la défense, par les associations, d’un intérêt général face aux intérêts particuliers des établissements détenant des animaux non domestiques.

D’autre part, l’annulation de la formation « certificat de capacité » confirme la lecture stricte de la loi du 30 novembre 2021 au sujet de la composition de la CNCFS. L’article L.413-9 du code de l’environnement imposant la présence des associations au sein de la commission, prévoir une composition spécifique excluant leurs représentants constitue une erreur de droit. Cette position constitue à n’en point douter le corolaire de celle adoptée pour la formation « conseil au ministère ». Si, d’un côté, l’omission d’exigence de proportionnalité empêche de sanctionner le déséquilibre d’une des formations, de l’autre, l’absence de différenciation explicite des rôles de chaque membre ne peut tolérer l’exclusion de certains d’entre eux d’un organe de la commission.

En définitive, le ministère de la Transition écologique doit à l’heure de la présente brève revoir sa copie. Inclure à la formation « certificat de capacité » un nombre significatif de représentants d’associations permettra d’apporter aux débats un point de vue désintéressé, motivé par la préservation des espèces animales et du bien-être des spécimens tenus en captivité. Rien que ne devrait logiquement craindre les autorités en charge de délivrer les certificats de capacité, en somme.

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